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Je suis arrivé en fonction à la mi-année alors que le directeur Jesse Zink amorçait un congé sabbatique bien mérité (du 1er janvier au 30 juin). À l’automne, au moment de la levée des restrictions liées à la COVID-19, mes visites au séminaire m’ont donné une première impression du nouveau visage de l’établissement, formé du Séminaire diocésain de Montréal ET des Études de l’Église Unie. Maintenant que le semestre est terminé, on sent que l’adaptation est de plus en plus naturelle, avec l’établissement de nouvelles traditions. Pour certains étudiants et certaines étudiantes, il n’y a pas eu de période d’adaptation, parce qu’ils et qu’elles n’ont jamais connu le séminaire autrement que dans sa réalité actuelle, qui est celle d’un contexte œcuménique accueillant diverses traditions, qui à la fois se mélangent et se distinguent.
Dans notre marche en commun, gens de l’Église anglicane et de l’Église Unie, nous avons été façonnés par une « culture institutionnelle » qui nous a inculqué des normes, des valeurs, des convictions et des présupposés, souvent malgré nous et même en dépit des intentions de nos instances ecclésiales respectives. Bien que je n’aie pas pris part aux tiraillements des débuts de la rencontre entre les cultures institutionnelles du Séminaire diocésain et du Séminaire Uni, je n’ai aucun doute que ce fut une période difficile, alors qu’il a fallu concevoir de nouveaux cadres de référence pour refaçonner une expression mutuellement satisfaisante du ministère de formation théologique. Une tâche difficile, d’autant plus que le corps professoral et les cohortes étudiantes du Séminaire Uni ont dû vivre un deuil en voyant disparaître leur propre séminaire. Ce déménagement au Séminaire diocésain de Montréal évoque en moi l’image d’une personne qu’on connaît relativement bien qui emménage chez nous. Bien que l’on fasse preuve d’un accueil sincère et que le nouveau venu en soit véritablement reconnaissant, il doit se produire une reconfiguration des manières de faire et de voir. Accueillir un nouveau venu qui devient partie intégrante de la famille requiert à la base des concessions de part et d’autre et l’acceptation d’une transformation de la culture de la maison. En célébrant notre projet institutionnel œcuménique, nous nous laissons refaçonner par l’autre, par ses modèles institutionnels, et nous nous ouvrons à toutes les découvertes que peut apporter une nouvelle relation.
Par son esprit œcuménique, notre engagement commun en tant que disciples du Christ Jésus suppose des différences d’approches et de façons de faire entre nos établissements. Faisant de nous plus que de simples compagnons de route, notre cheminement en commun nous transforme en partenaires soucieux l’un de l’autre et s’adaptant aux pas de l’autre, tout en reconnaissant que nous sommes tous en train d’apprendre une nouvelle façon de marcher. Parfois, l’autre nous émerveille : « Tu peux marcher dans ces souliers? »; « N’as-tu pas trop chaud en portant ce vêtement? »; et parfois, on veut le protéger : « Fais attention où tu vas, je ne serai peut-être pas là pour te rattraper une prochaine fois! ». Refaçonner la culture institutionnelle est autant une démarche de découverte de soi que de négociation avec l’autre et d’ajustements techniques. Cela dit, dans un esprit œcuménique, nous reconnaissons les fondations d’une culture partagée d’idées, de valeurs et de normes communes. Nous aspirons à être des disciples s’adonnant au ministère tel que Jésus l’a enseigné, en a donné l’exemple et l’a révélé. Nous souhaitons faire monter notre louange et notre action de grâce au Dieu omniprésent dont l’Esprit Saint nous dynamise afin que « ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. »
Même si nous avons vécu cette démarche dans le contexte des restrictions liées à la COVID-19, c’est avec gratitude que je constate le chemin parcouru par les cohortes étudiantes, les corps professoraux et les conseils anglican et uni, depuis les discussions initiales, la conclusion des accords officiels et enfin le « déménagement ». Je prie que le Saint-Esprit nous guide dans l’actualisation de notre œcuménisme alors que nous refaçonnons nos manières de faire et définissons notre nouvelle culture institutionnelle. Cette démarche sera faite d’exploration, de tâtonnements, des reprises et des refontes, mais donnera également lieu à une évolution individuelle s’orientant vers la formation d’un seul établissement : un séminaire consacré aux études théologiques fondées sur l’œcuménisme.
La prière de Jésus à ses disciples, « que tous soient un », nous révèle ce qu’implique l’œcuménisme, alors que nos cultures institutionnelles progressent de manière à ce que nous devenions un. Le terme œcuménisme, si aisément revendiqué, tire son origine du mot grec oiïkoumène, qui signifie tout le monde habité, connu. Ce sera seulement si nous sommes un, dans l’oïkoumène, que nous pourrons accomplir notre mission d’établir le règne de Dieu, ici et maintenant, « sur la terre comme au ciel ». Être « un » dans la formation au ministère, pour se mettre au service de l’Évangile en proposant des manières de faire qui manifestent le dessein de Dieu pour tout le monde habité dans la vie de nos communautés chrétiennes. Se laisser définir moins pas son affiliation à une institution ecclésiale que par le fait d’être des disciples de Jésus qui, dans ce contexte particulier, affinent leurs compétences et discernent leurs dons afin d’être partenaires de Dieu, pour « que ton règne vienne, que ta volonté soit faite, sur la terre comme au ciel ».
Eric Dyck, pasteur
Directeur par intérim